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Un bel événement à l’Académie du Climat
Le 5 octobre dernier, sollicités par la Coop des territoires, nous avons organisé ensemble une rencontre à l’Académie du Climat autour de l’enjeu de la transition écologique en zone rurale, et particulièrement dans l’Orne, en Normandie. Nous avons débattu du retour d’expérience de degré sur la résidence d’architecture menée en 2022 sur le bassin versant de la Rouvre, et des multiples expérimentations locales de la Coop des territoires, représentée par Igor Louboff.
Merci à celles et ceux qui ont fait le déplacement et qui nous ont posé un grand nombre de questions très intéressantes !
Les images !
Vous trouverez ci-dessous les images que nous avons présentées lors de l’événement, avec nos commentaires.
Questions / Réponses !
Et enfin, il nous semblait important de proposer des pistes de réponses à plusieurs questions qui nous ont été posées durant la rencontre. Les voici !
La résidence n’avait pas de périmètre donné, il ne s’agissait pas d’une commande politique (émanant d’une commune ou d’une intercommunalité par exemple). Nous avons travaillé à l’échelle du bassin versant de la Rouvre, qui est une réalité géographique, mais pas administrative : il s’étend sur 3 communautés de communes (CC) et une communauté d’agglomération (CA). Et nous sommes restés très inclusifs : des habitantes et habitants de 38 communes ont participé à la démarche, dont 20% qui n’habitaient pas dans le bassin versant de la Rouvre, mais à proximité. L’intérêt de ne pas avoir de périmètre précis permet de n’exclure personne. L’inconvénient, c’est ensuite qu’il est plus compliqué de mobiliser les décideurs politiques, car le bassin versant n’est justement pas un périmètre administratif.
La filière du granit existe encore en France, mais a fortement décliné en Normandie depuis la deuxième moitié du XXème siècle. Il existait avant des carrières de granit dans le bassin versant de la Rouvre. C’était le cas de Bréel par exemple, village dans lequel de nombreuses traces de l’exploitation du granit sont visibles. D’après le schéma départemental des carrières de l’Orne, il n’existe plus de carrières de granit ni dans l’Orne, ni dans le Calvados (les plus proches sont au sud-ouest de Vire, dans la Manche).
En 2020 en France, près de 70% du granit provient de Midi-Pyrénées, environ 25% de Bretagne, d’après les chiffres du Syndicat national des Industries des Roches Ornementales et de Construction (SNROC). 63,4% du granit est utilisé pour les monuments funéraires, 24,1% pour les bâtiments (tout confondu : parements, sols, structures…) et 12,5% pour les aménagements de voirie (pavés, bordures de trottoirs…).
Les chiffres clés de la filière granit
Les anciennes carrières de granit de Bréel, Athis-val-de-Rouvre (61)
La carte des carrières en France
L’enjeu premier de notre résidence était de toucher le plus de monde possible dans un temps assez court (6 semaines). Nous n’avons pas eu le temps (et ce n’était pas l’objet) de définir en amont les différents types de publics, de s’assurer de disposer d’un échantillon représentatif de la population, etc. Et nous n’avons pas non plus eu le temps d’aller à la rencontre des publics dits “difficiles”. Avant “d’aller chercher les publics difficiles”, il s’agit d’en préciser la définition. De qui parle-t-on ? Des abstentionnistes, des personnes qui ne peuvent pas se déplacer, des timides qui n’osent pas venir aux réunions publiques et y prendre la parole, des opposants à l’équipe municipale, des personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté, des habitants des quartiers politique de la ville, des jeunes déscolarisés, des détenus ? Ensuite, il faut définir une méthode pour les rencontrer. Faut-il faire du porte-à-porte comme lors des campagnes électorales ? Quels lieux faut-il privilégier ? Quels moments sont propices pour les rencontrer ? Quelles méthodes mettre en place pour s’assurer que chacun ait sa place et se sente à l’aise ?
Il n’y a pas de recette miracle. Mais pour élaborer tout cela, il faut soit beaucoup de temps, soit beaucoup de monde ! Donc non, la résidence n’a pas permis de le faire. Mais en imaginant un format différent et la mobilisation de compétences complémentaires, ce serait tout à fait envisageable.
Nous avons choisi la carte imprimée sur papier (format A3) sur laquelle les participants doivent coller des gommettes de couleur. Il s’agit d’un fond de carte issu d’Open Street Map. Les cartes sont à remplir individuellement. Nous avons choisi la carte parce que c’est un élément incontournable dans notre pratique professionnelle de l’architecture et de l’urbanisme, et parce que chacun a été confronté au moins une fois à une carte dans sa vie (cartes géographiques et historiques à l’école, cartes de randonnées, représentations cartographiques des réseaux de transports en commun, cartes routières, cartes touristiques, plans de localisation dans un quartier…). Nous voulions une méthode efficace (plusieurs personnes peuvent compléter leurs cartes simultanément sur un stand) et conviviale (la carte imprimée permet de susciter la curiosité, d’engager facilement la discussion à partir des lieux que les habitants connaissent…). Et nous avons donné quelques indications très simples pour coller les gommettes, ce qui n’empêche pas que les questions soulevées soient complexes.
C’est difficile de savoir dans quelle mesure. Mais il est évident que le format influence toujours les réponses. Par exemple, la carte comporte des limites. Si je veux mettre une gommette sur un lieu qui est au-delà des limites, ce n’est pas possible. Une partie des pratiques des habitants risque donc d’être invisibilisée. Un autre exemple, nous avons choisi de représenter les routes pour que les habitants puissent se repérer. Nous aurions pu faire le choix de ne pas les représenter, ce qui aurait peut-être laissé plus de liberté aux habitants pour dessiner leurs trajets rêvés. Enfin, le fait de ne leur permettre de poser qu’une ou deux gommettes par couleur les oblige à faire des choix. Cela nous a permis de faire ressortir les lieux qui comptent le plus pour les habitants, mais nous avons sûrement perdu en richesse et en complexité : est-ce qu’avec une gommette de plus d’autres lieux seraient apparus ?
Pour répondre à cette question, nous vous proposons de comparer la définition de la permanence architecturale proposée par l’École du Terrain, avec la définition d’une résidence d’architecture proposée par le Réseau des maisons de l’architecture.
Pour ouvrir le débat, voici selon nous deux différences. La permanence implique a priori un temps plus long (plusieurs mois, voire années) que les résidences d’architectures (6 semaines dans le cas des résidences d’architectures du Réseau des maisons de l’architecture). Et la permanence s’inscrit dans le cadre d’un projet architectural ou urbain dont elle contribue à définir les orientations, ce qui n’est pas forcément le cas des résidences, qui ne sont pas toujours en lien direct avec une commande architecturale ou urbaine déjà exprimée. Ces deux formats sont donc selon nous plutôt complémentaires : par exemple, une première démarche de résidence sur un territoire peut permettre d’identifier le besoin d’une permanence pour un accompagnement plus long des acteurs de ce territoire ; ou à l’inverse, une permanence peut révéler le besoin d’une résidence sur un temps court et très animé sur un sujet particulier, en complément de l’accompagnement plus long et plus global de la permanence.
“La notion de permanence implique d’habiter sur un temps long un territoire. Elle part du principe qu’habiter est le fondement afin de mieux appréhender un contexte en étant soi-même devenu la projection de ceux pour qui nous construisons. En ce sens la permanence implique un changement de posture profond tant intellectuel que pratique dans les métiers de la maîtrise d’ouvrage et de la maîtrise d’œuvre en architecture et urbanisme. Nous avons souvent entendu que l’architecte ne pouvait plus rester le dernier maillon de la chaîne de production du bâtiment ou de la construction de nos villes. La permanence, en étant présente dès le départ de la commande ou en avant-poste de celle-ci, peut alors rassembler les phases de construction mais aussi être la cheville ouvrière d’interprétation de la commande. En étant sur le site même du projet, en comprenant un territoire dans toutes ses composantes, en révélant ses atouts et potentialités, elle peut alors répondre de manière plus juste, précise et unique en rassemblant les forces vives et les ressources qui le composent pour produire un urbanisme ancré et vivrier. La permanence agit comme tiers-acteur entre l’élu et le citoyen, les techniciens et les artisans, entreprises et en ce sens peut, à son échelle être source d’activation de nos démocraties locales dans la fabrique de la ville.”
L’Ecole du Terrain
“La résidence d’architecture est un projet culturel créant les conditions d’une rencontre entre un architecte mandataire accompagné d’un ou plusieurs autres professionnels, et des populations, des élus, habitants, acteurs locaux, sur un territoire et dans un contexte donné. Un architecte mandataire et son binôme sont accueillis pendant six semaines dans un territoire où ils sont en immersion. Ils habitent et travaillent sur place. La résidence a pour vocation de contribuer à ouvrir le regard des habitants et des acteurs locaux sur les problématiques contemporaines liées à l’identité des villes et des territoires.”
Réseau des maisons de l’architecture